Marcel PROUST (1871.1922)

Lettre autographe signée à la baronne Aimery Harty de Pierrebourg.

Trois pages in-8°. 102 bd Haussmann. 29 décembre [1915]

Kolb, Tome XIV, pages 325-326.

 

« Une rose d’automne est plus qu’une autre exquise »  Celle-là était d’été encore. Rose humaine hélas et sur laquelle pleurent bien des larmes.

Marcel Proust envoie ses vœux teintés du souvenir de la mort de Paul Hervieu, l’amant défunt de sa correspondante.

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« Madame, En ces jours de renouvellement où les blessures font plus mal je pense à vous que cette année finissante a si cruellement meurtrie. Je n’ai pas connu Madame votre Mère, ni votre fils. Mais j’ai connu l’incomparable ami qui avait reçu ce privilège unique, aussi anormal dans le règne des esprits que dans le monde végétal, ayant porté tant de fruits amers et doux et nourriciers, de garder la grâce, la fraîcheur, les pétales rosés d’une fleur. Si bien qu’on peut dire malgré les vergers combles de sa fructification arrivée à la maturation la plus pleine, que c’est en fleurs encore, qu’une mystérieuse nuit de guerre, et silencieusement comme une fleur, il a été fauché. « Une rose d’automne est plus qu’une autre exquise » [vers d’Agrippa d’Aubigné]. Celle-là était d’été encore. Rose humaine hélas et sur laquelle pleurent bien des larmes. Dites à Madame votre fille et à Georges que je pense infiniment à eux et daignez agréer Madame tous mes respects. Marcel Proust. »

 

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Belle-mère de Georges de Lauris, l’un des camarades de Marcel Proust rencontré en 1903 et qui fut un conseiller écouté pour la rédaction de ce qui deviendra Contre Sainte-Beuve, Marguerite de Pierrebourg (1856-1943) fut d’abord peintre avant de se tourner vers l’écriture. Son premier roman fut distingué par l’Académie française et elle devint à partie de 1912 présidente du prix de la Vie heureuse (futur prix Fémina), occupant ainsi une place importante dans la vie littéraire parisienne. Marcel Proust fréquentait son salon et la consultait pour des questions d’ordre littéraire. Elle fut notamment l’un des témoins de la difficile gestation du premier volume d’A la recherche du temps perdu. 

 

 

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