Napoléon BONAPARTE - Lettre autographe signée à André Ramolino.

Lettre autographe signée à André Ramolino, cousin de Letizia Bonaparte.

Très rare lettre de la main du futur Empereur, sur ses frères Joseph et Louis, et sur la situation politique en France après l’adoption par la Convention de la Constitution de l’an III

« L’on a très tord de voir les choses au tragique la republique puissante en dehors saura bien retablir la police au dedans. »

Vendu

NAPOLEON (1769.1821)

Lettre autographe signée à André Ramolino, cousin de Letizia Bonaparte.

Deux pages in-8°

Paris. 21 fructidor (7 septembre 1795)

Précieuse et rare lettre de la main de Bonaparte à propos de ses frères Joseph et Louis, ainsi que sur la situation politique en France après l’adoption par la Convention de la Constitution de l’an III.

« J’ai reçu dans le tems la lettre de credit que vous m’avez fait passer. Ecrivez à Joseph que je lui écris tous les jours par Geneve et que je lui envoy les gazettes par Monaco. La place que vous aurez dans les charois est très honorable puisqu’elle est d’inspecteur avec 800ll par mois et trois rations de pain de viande et de fourage. Je vous en enverrai le brevet demain ou après. L’on est ici très tranquille l’on a très tord de voir les choses au tragique la republique puissante en dehors saura bien retablir la police au dedans. La famille et Louis se portent bien. Je suis très content de ce dernier il merite toute mon amitié et est digne de mes soins. Les assemblées primaires sont reunies elles sont très tranquilles. Il y a cependant un peu de chaleur dans les têtes mais ce ne sera rien. J’attend une occasion favorable pour pouvoir achetter la terre que desire Joseph. BP. Rien de nouveau de la Vendée ni du midi si ce n’est que la convention a fait des decrets tres severes pour les pretres et les emigrés.»

Cette lettre est adressée au cousin germain de la mère du futur empereur : André Ramolino. Homme politique corse né et mort à Ajaccio, Ramolino fut fidèlement protégé par Napoléon. Dès 1792, les deux hommes font déjà affaire, comme en témoigne une lettre du cardinal Fesch datée du 10 septembre. Cette fidélité de Napoléon se traduira par une ultime faveur : quelques heures avant de quitter son Empire déchu, en juin 1815, il fit de son correspondant le dernier comte d’Empire.

Dans cette missive, Bonaparte promet à Ramolino le brevet d’inspecteur des charrois. Le cadeau est de taille : On désignait sous ce nom oublié les transports de vivres, effets militaires, matériel d’artillerie, et autres intendances qui prenaient la forme de sociétés fort lucratives. Joseph Bonaparte occupa d’ailleurs également ce poste. La promesse de Bonaparte exprimée dans cette lettre fut respectée. Une autre lettre, adressée à son frère Joseph, du 9 octobre 1795, est formelle : « Ramolino est nommé inspecteur des charrois ».

Ecrites au lendemain de la première constitution républicaine (Constitution de l’an III), ces lignes sont un témoignage fort de l’atmosphère parisienne en ces heures capitales de l’Histoire de France.

Le caractère, l’ambition de Napoléon, son amour fraternel, sa ferveur républicaine et, sa lucidité apparaissent tour à tour à la lecture de cette page.

Napoléon en effet n’aura de cesse que de subvenir aux besoins de ses frères et de les hisser avec lui au sommet de l’Etat. Cette préoccupation pour leur intérêt apparait très clairement dans cette lettre. Et la correspondance quotidienne à cette même période avec son frère Joseph s’en fait écho. La veille de notre lettre, une autre adressée à Joseph déclame ce même amour ; « Je suis très-content de Louis ; il répond à mon espérance et à l’attente que j’avais conçue de lui. C’est un bon sujet ; mais aussi c’est de ma façon : chaleur, esprit, santé, talent, commerce exact, bonté, il réunit tout. Tu le sais, mon ami, je ne vis que par le plaisir que je fais aux miens. Si mes espérances sont secondées par ce bonheur qui ne m’abandonne jamais dans mes entreprises, je pourrai vous rendre heureux et remplir vos désirs »

Surtout, sa détermination et sa foi initiale en la République paraissent inébranlables. Notre lettre précède de quelques semaines à peine la répression sanglante de l’insurrection royaliste. Bonaparte en effet, le 5 octobre, tout juste nommé général en chef de l’armée d’intérieur, fera mitrailler la foule sur le parvis de Saint-Roch, tuant 300 français. Cette entièreté pour la cause révolutionnaire est très claire et prend sous sa plume la force d’une formule historique : « la république puissante en dehors saura bien rétablir la police au-dedans ». C’est la politique napoléonienne des vingt années à venir qui est ici, en quelques mots seulement, résumée !

Paradoxalement, les réserves de Napoléon Bonaparte sur le sort destiné à la Vendée, aux prêtres et aux émigrés est franchement exprimée. Encore une fois, notre lettre précède de quelques jours seulement le refus de Bonaparte de rejoindre l’Armée de l’Ouest, armée chargée de noyer dans le sang l’insurrection vendéenne. Ce refus dicté par sa conscience lui vaudra l’exclusion de la part du Comité de Salut Public de la liste des généraux, jusqu’à son coup de force de Vendémiaire. Le Nota Bene de cette lettre est capital. Il dit tout le recul de Bonaparte sur les erreurs de la Convention et annonce prophétiquement sa constante volonté de rassembler plus tard, la France de Clovis et celle du Comité.

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