Auguste RODIN - Ensemble de cinq lettres à la comtesse Greffulhe.

« Je suis très heureux de cette occasion d’année nouvelle pour vous marquer toute l’affection reconnaissante que j’éprouve pour votre bienveillante sympathie pour le sculpteur. »

6.500

Auguste RODIN (1840.1917)

Ensemble de 5 lettres autographes signées à la comtesse Greffulhe.

Neuf pages in-8° au total.

Entre décembre 1905 et juillet 1913.

« J’embrasse vos mains de Diane chasseresse. »

Intéressante correspondance entre le sculpteur et la comtesse Elisabeth Greffulhe, témoignant de leur lien artistique à l’aube du XXe siècle.

 

________________________________

 

Lettre n°1.

[Paris] 31 décembre 1905.

Une page in-8° sur papier à son adresse de la rue de l’Université.

Rodin anticipe la nouvelle année pour témoigner sa gratitude à la comtesse.

« Madame la Comtesse Greffulhe, Je suis très heureux de cette occasion d’année nouvelle pour vous marquer toute l’affection reconnaissante que j’éprouve pour votre bienveillante sympathie pour le sculpteur. C’est une joie de vous la dire en déférences et en respects ainsi qu’à Monsieur le Comte de Greffulhe. Auguste Rodin. »

 

________________________________

 

 

Lettre n°2.

[Paris] 11 juillet 1911.

Deux pages in-8° sur papier à son adresse de l’hôtel Biron.

Charmante lettre de Rodin à l’inspiratrice de Marcel Proust, témoignage des salons littéraires et artistiques parisiens du début du XXe siècle.

« Chère Madame, vous m’aviez invité hier soir à votre réunion, pour étudier et voir avec vous, une femme qui a étudié, comme moi l’antique, vous vouliez m’en faire profiter. Je reconnais bien là la charmante étude de goût exquis que vous faites des belles désinvoltures ; fêtes inoubliables, chanteurs célèbres, etc. Vous m’associez à tout cela je vous en remercie de tout cœur et agréez l’expression de mes hommages sincères et admiratifs. Aug. Rodin »

  

Construit par l’architecte Jean Aubert, l’Hôtel Biron – 77 rue de Varenne – a été découvert dans un état proche de l’abandon par Rodin en 1908. Il en loua les quatre pièces au rez-de-chaussée avant d’occuper l’ensemble de la demeure à partir de 1911. En ces lieux, le sculpteur a préparé l’aménagement de ce qui deviendra, le 4 août 1919, le musée Rodin.

 

________________________________

 

 

Lettre n°3.

[Roquebrune]. 17 janvier 1912.  Deux pages in-8°.

« [Je] dois aller à Rome placer une sculpture dans la cour du Palais Farnèse. »

Le sculpteur français en partance pour le Palais Farnèse où doit être installé l’un de ses plus grands chefs-d’œuvre, L’Homme qui marche.

« Madame la Comtesse Greffulhe. Vous me faites la grande amitié de m’inviter à Bois-Boudran, malheureusement je suis à Roquebrune et dois aller à Rome placer une sculpture dans la cour du Palais Farnèse. Je suis désolé mais heureux d’avoir eu un témoignage de votre honoré souvenir. Avec mes profonds hommages que je vous prie d’agréer. Auguste Rodin. 17 janvier 1912. »

 

L’Homme qui marche. A la fin du XIXe siècle, Rodin reprit l’une de ses études de Saint Jean-Baptiste, exposée au Salon de 1880, afin de la retravailler. Conservant l’aspect fragmentaire du buste, le sculpteur fit réaliser, en 1900, une épreuve en plâtre et lui assembla deux jambes au modelé lisse. Maître du contraste et de l’équilibre, Rodin donna vie et mouvement à cette figure colossale dépourvue de tête et de bras.

Baptisée L’Homme qui marche par les assistants du sculpteur, l’œuvre fut présentée au Pavillon de l’Alma, le 1er juin 1900, lors de sa première grande rétrospective personnelle.

Douze années plus tard, le colosse est donc installé dans l’atrium du Palais Farnèse, à Rome – siège de l’ambassade de France – où il trônera jusqu’après la mort de Rodin, avant d’être rendu à la France.

A partir de 1947, Alberto Giacometti reprit ce thème de l’homme en mouvement. Plusieurs versions son Homme qui marche furent créées jusqu’à l’aube des années 60, offrant ainsi à la sculpture, dans la continuité de Rodin, ses plus belles et symboliques lettres de noblesse.

Le château de Bois-Boudran est situé dans la commune de Fontenailles en Seine-et-Marne. Acquis à l’aube du XIXe siècle par le comte Jean-Henry-Louis Greffulhe, le château revint par descendance à son petit-fils, Henry Greffulhe, époux de la comtesse, et modèle de Marcel Proust pour le personnage du duc de Guermantes.

________________________________

 

Lettre n°4.

Sans lieu. 22 mai 1912. Deux pages in-8°.

Rodin sollicité pour une exposition de ses sculptures.

« Madame la Comtesse Greffulhe. Chère Madame, Monsieur Manzi [l’éditeur et marchand d’art Michel Manzi] est venu me voir de votre part et demande pour la fin du mois des sculptures pour que j’expose avec quelques artistesdes grands ; c’est oui, mais je n’ai aucun temps et c’est trop vite pour faire une chose très bien.  J’espère toujours grâce à vous et à votre étoile à une chose nouvelle. Il y a, à Lyon une jolie tête elle ne reviendra à Paris que le 12 juin. Chère Madame permettez-moi de vous envoyer mes hommages très et bien dévoués. Auguste Rodin. 22 mai 1912. »

 

________________________________

Lettre n°5.

[Paris] 8 juillet 1913. Deux pages in-8°.

« J’embrasse vos mains de Diane chasseresse. »

Rodin, épuisé, n’a pu répondre à la jolie invitation de la comtesse.

« La Comtesse Greffulhe. Chère Madame, Je suis malchanceux et votre jolie invitation est restée sans effet ; reçue le dimanche néanmoins le soir j’étais trop fatigué déplorant d’avoir dépensé mes forces. Je suis pourtant un de vos serviteurs les plus dévoués. J’embrasse vos mains de Diane chasseresse. Auguste Rodin. »

  

________________________________

 

Mondaine et amoureuse des arts, Elisabeth Greffulhe fut un soutien constant pour Rodin et la promotion de sa sculpture. Elle présenta en effet, au fil des années, l’artiste à de nombreux mécènes, collectionneurs et hommes d’état, tels que le roi du Portugal, le roi de Suède, la grande duchesse Wladimir de Russie, le ministre de l’Argentine Monsieur Lainez, et le ministre de l’Instruction publique Léon Bourgeois, Isadora Duncan, Edmond Rostand, Gabriele d’Annunzio…

En 1912, la comtesse, alors présidente du Comité d’art décoratif français, sollicita la collaboration de Rodin pour une exposition organisée au bénéfice des Écoles ménagères et de l’office central des œuvres de bienfaisance.

En 1913, Rodin contribua – avec un masque de Dante – à l’exposition transatlantique organisée par la comtesse à bord du paquebot France.

L’année suivante, organisant, à Londres, l’exposition Modern French Art: from Ingres to Cézanne, la comtesse convia encore Rodin à exposer ses sculptures parmi les œuvres des plus grands maîtres français. L’artiste confia dix-neuf créations – dont L’Age de Bronze, Le buste de Victor Hugo, et une étude de Balzac – et fit le déplacement outre-Manche pour assister au vernissage, puis un deuxième voyage à Londres pour présenter lui-même ses œuvres à la reine Mary d’Angleterre.

________________________________

 

Bibliographie : La comtesse Greffulhe et Rodin. Romances notes. J. Newton & M. Fol.

 

 

Formulaire de contact

Nouveautés