George SAND (1804-1876)

Lettre autographe signée à Jean-Gabriel Falampin.

Une page ½ in-8°. Adresse autographe sur le quatrième feuillet.

Slnd. [Nohant, juin 1847]

 

« Et comment va notre guerre contre les voleurs de Mare au diable ? »

George Sand évoque ses terres du Berry et l’un de ses plus célèbres ouvrages.

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« Mon cher Falampin, vous aviez laissé à Maurice [son fils Maurice Sand] un bois qu’il ne veut pas vous chiper. Il vous le renvoie avec un petit aspect très fidèle des pierres jômatres, ce cromlech celtique qui figure dans Jeanne, et où il a été passer qq. jours dernièrement. Il en a pris plusieurs vues et il a copié aussi les tapisseries du château de Boussac qui sont fort curieuses.

Si vous voulez plus d’échantillons de son voyage il vous en enverra. Mais vous nous ferez passer des bois, car il n’y a pas moyen de s’en procurer ici. Si vous voulez employer celui-ci pour l’Illustration, dites, et je vous enverrai une ou deux pages d’explication, si c’est nécessaire. En pour [expression berrichonne signifiant « en récompense »], vous nous enverrez le journal.

Et comment va notre guerre contre les voleurs de Mare au diable ?

Tout à vous, j’espère que votre femme va mieux, du moins je le désire bien et de tout mon cœur. G. Sand ».

 

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Gabriel Falampin (1803-1860), dont le nom vaudevillesque prêtait à sourire en son époque, fut le chargé d’affaires de George Sand à partir de 1841. Avocat, peintre du dimanche, il fonde avec Jean-Baptiste-Alexandre Paulin le journal L’Illustration dont il assure la direction artistique. Les bois ici évoqués par George Sand sont les matrices des gravures parues dans son journal, publié le 3 juillet 1847, et auquel George Sand contribua en évoquant son Berry.

George Sand évoque également les pierres jômatres, près du château de Boussac et du chef d’œuvre alors méconnu qu’abritait ledit château : la célèbre tapisserie de la Dame à la Licorne, aujourd’hui pièce maîtresse des collections du Musée de Cluny à Paris.

Ces pierres jômatres étaient considérées par Sand et ses contemporains comme des pierres levées par les gaulois pour leur culte et étaient objets de fascination. Elles constituent le théâtre du roman Jeanne écrit par la femme de lettre en 1844, où elles sont décrites comme telles : « Ces blocs posés comme des champignons gigantesques sur leur étroite base, ce sont les menhirs, les dolmens, les cromlechs des anciens gaulois, vestiges de temples cyclopéens… Autels effroyables où l’on égorgeait les prisonniers et les esclaves pour apaiser les farouches divinités. Des cuvettes et cannelures, creusées dans les angles de ces blocs semblent révéler leur abominable usage et avoir servi à faire couler le sang… ».

En fin de lettre, George Sand s’enquiert auprès de son avoué de la « guerre contre les voleurs de Mare au diable » ; à défaut de guerre, il s’agit de son procès contre la Société des Gens de Lettres, qui avait vendu de manière illicite le droit de reproduire son célèbre roman, causant ainsi un sérieux préjudice à l’auteur et à son éditeur.  Sand gagnera ce procès, après diverses péripéties, en 1849.

 

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Bibliographie :

. À propos du procès, voir la Correspondance Lubin. Éditions Classiques Garnier. Tome VII, pp. 520-522 et 754.

. Lettre inédite aux correspondances de Georges Lubin (Garnier) et Thierry Bodin (Gallimard).

 

 

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